Une rationalisation des principes de Cagliostro

KNEPH PENSEURS FRANC-MAÇONNERIE ÉGYPTIENNE

Ne tentons pas une approche intellectuelle, essayons de « désocculter » les pratiques de la haute maçonnerie égyptienne en abordant celle-ci d’un point de vue « physico-alchimique » car effectivement, combien de maçons ont réellement expérimenté des jeûnes prolongés, complétés par d’autres praxis ? Combien en ont réellement senti les effets et les transformations tant dans le corps, que dans l’âme, puis en esprit et en vérité ? Personnellement je n’en connais que très peu !

Afin de mieux comprendre notre propos, résumons ce que propose Cagliostro dans son langage et traduisons-le : 

Voici en préambule ce qui est explicité dans le catéchisme de compagnon : « Tout homme qui veut travailler avec fruit sur la philosophie naturelle et surnaturelle doit bâtir un temple à l’Éternel et chercher à se régénérer non seulement physiquement mais encore moralement. Il faut qu’il emploie tous ses efforts pour devenir l’apôtre et le sacrificateur de la grandeur et de la toute puissance de Dieu… L’Éternel, en créant la matière première l’a doué d’une telle perfection… »(1). 

C’est toute la voie proposée par Cagliostro résumée ici ! Quelques points rapprochent Cagliostro de la voie des Chevaliers Maçons Elus Coëns de L’Univers. Tout d’abord dans son système, les patriarches bibliques ont une grande importance car eux aussi ont réalisé l’alliance en respectant un processus ; ce sont les exemples à imiter. La réintégration au sens du Grand Cophte est une régénération pour acquérir l’immortalité, imiter, devenir semblable à Dieu, s’allier à lui ; c’est donc une praxis pour les hommes de désir au début, puis pour les élus au final, les choisis de la providence divine. Pour lui, cette voie va de haut en bas, puis de bas en haut ; de la conscience au corps et du corps à l’esprit. L’impulsion de la conscience à vouloir en est le point de départ, le désir… Puis après l’avoir purifié, c’est au corps physique qu’il s’adresse (et c’est l’un des rares à en parler dans les voies occidentales) et enfin à l’ensemble de l’homme. En fait, Cagliostro suit en cela Pythagore qui expliquait qu’il fallait devenir un homme, puis un dieu, puis que pour s’unir à dieu, il était nécessaire de le suivre et de l’imiter en un commerce intime.

L’usage des quarantaines

Tout son système égyptien repose sur les processus de régénération au travers des quarantaines morales et physiques… Processus d’accélération d’états spirituels à cristalliser par la relation aux corps… Entendez la pratique qui sera abordée plus en détail dans la partie “Méditations et prières” de neuvaines dans tous les actes respectifs de l’âme (le 6), du corps (le 3), de l’esprit (le 9), et comme on le voit, Cagliostro utilise la combinaison 6/3/9 répétées 3 fois pendant 33 jours, puis durant 7 jours supplémentaires aboutissant donc à une somme de 40 jours. « C’est en mémoire de la plus grande vérité et qui est une des plus importantes connaissances que je puisse vous procurez : c’est pour vous apprendre que l’homme a été formé en trois temps et qu’il est composé de trois parties distinctes, morale (comprenez esprit), physique (le corps), et pouvoir (comprenez désir, volonté, étincelle divine… mais aussi participation de la providence divine). C’est enfin pour vous faire comprendre que pour ne pas errer dans les opérations philosophiques et pour les perfectionner, ce que vous faites une fois, il faut le recommencer toujours trois fois ou trois fois trois »(1). 

Daniel Nazir dans son introduction au Rituel de la franc-maçonnerie égyptienne (2) précise bien que de dépeindre les quarantaines avec leurs effets physiques n’ont pour objectif que de frapper l’imagination … Qu’il s’agit plus d’allégories que d’effets réels. En effet, comment parler d’immortalité et de régénération alors que Cagliostro lui-même est décédé à San Leo à un âge raisonnable pour l’époque ! Il semble donc qu’il n’existait réellement qu’une seule quarantaine.
Du récit allégorique aux processus, essayons de dépoussiérer la fable.

De nos sens à notre cerveau

Tout d’abord, en tant qu’être humain, nous sommes issus de la rencontre d’un spermatozoïde et d’un ovule, tous deux porteurs de mémoires sous formes d’atomes baignant dans des champs électromagnétiques (là est notre matière première) plus ou moins densifiés (nos  eaux) portant les signatures de l’endroit où nous sommes nés et des influences extérieures du moment et prêts à nous imprégner des expériences à venir dans la matière. Cette étincelle divine, cet électromagnétisme identique au Big-Bang, cette vie, nous la manifestons physiquement en trois temps, avec notre colonne vertébrale constituant le « corps » de notre moelle épinière, elle-même étant « l’âme » de notre cerveau, siège de notre conscience et de notre esprit, ou du centre vers la périphérie… Ces trois parties de nous-mêmes sont véritablement « trois temps » ayant en commun une vibration, un mouvement de respiration primaire, véritable souffle de notre étincelle divine. Et oui, nous sommes tous « des spermatozoïdes sur pattes » baignant dans nos eaux que constituent les « extensions électromagnétiques/fluidiques » de notre corps de chair, de nos émotions et de notre conscience. Nous sommes ainsi construits pour vivre, ressentir, expérimenter, participer et faire participer notre étincelle divine à la réalité de la matière ; ce sont nos sens et nos degrés de conscience. Mais dans le plan de la matière, les mécanismes sont inversés et vont de la périphérie à l’intérieur et non de l’intérieur vers la périphérie, de nos sens à notre cerveau qui, lui, interprétera, classera et mémorisera les expériences vécues et ainsi ne vivra pas pour lui-même à moins qu’un certain travail ne soit effectué. Nous nous remplissons ainsi jusqu’à oublier l’impulsion divine qui nous a constitués. 

Une Régénération

Ce que propose Cagliostro est de revenir au centre, refaire vibrer, refaire circuler cette étincelle divine par l’esprit, puis le corps en créant des états afin qu’elle s’unisse à nouveau à ce qui l’a créé… que le « spermatozoïde sur pattes » accouche de son être réel et désormais divinisé, que nos « corps fluidiques » (ces derniers ne sont d’ailleurs pas comme on le voit trop souvent dans les livres la réplique de notre corps de chair…) ne fassent tous qu’un dans un corps de gloire constitué ! Nous sommes tous, dès lors des « cerveaux/ventres » en puissance et en conscience ! Telle est notre perfection comme le dit le Grand Cophte. C’est de cette génération que nous nous construisons à nouveau mais en « désir conscient » : c’est donc bien une régénération permettant à ceux qui sont élus d’acquérir une forme d’immortalité. 

Régénération dont à certaines étapes les effets physiologiques, kinesthésiques et « électromagnétiques » sont bien réels notamment dans la zone de la nuque, du cervelet, et du cerveau… Ainsi l’on comprend mieux certaines vieilles gravures dans lesquelles on voyait la tête auréolée ou encore pourvue de petites ailes ou de nuages… En préambule de cette première phase, il est absolument indispensable et même vital que le maçon qui commence ces pratiques se connaisse vraiment très bien, ait pu identifier en conscience et donc après un long travail de présence ce qui constitue son âme, ce qui relie sa conscience à son cœur.

L’âme est donc un état impliquant l’accord des éléments énumérés ci-dessus. En effet, imaginez que cet état ne soit pas connu et soumis aux plus basses vertus et principes : cela donnerait d’immenses chocs et déséquilibres dans le cerveau d’un homme non préparé. Et c’est sans doute pourquoi Cagliostro ne proposait son système qu’à des maçons expérimentés. Le Grand Cophte ne précise pas si avant ces quarantaines, il existait une préparation lente et régulière, mais c’est fort probable. Comme en alchimie, la préparation de l’opérateur n’est jamais décrite. Cette préparation devait comprendre un régime alimentaire végétarien amenant progressivement le corps à se détoxifier, puis à une meilleure vitalisation. Meilleure respiration, meilleure circulation sanguine, meilleur influx nerveux, meilleures sécrétions endocrines et donc meilleure activité cérébrale puisque tout se passe dans le cerveau, vous l’aurez compris ! À cela devait s’ajouter la pratique quotidienne de prières et autres dévotions favorisant les pratiques des prochaines étapes. 

Méditations et prières

La première partie du travail que propose Balsamo (Nom de naissance de Cagliostro) consiste en un travail sur les mouvements de notre âme, notre corps mercuriel comme il le précise dans son catéchisme d’apprenti : « La pierre brute, la partie mercurielle […] Lorsque notre pierre brute à été purifiée de toutes ses impuretés, elle devient cubique… » (3). Ces travaux consistent en un effort quotidien de 6 heures de « réflexions et de repos… ». C’est-à-dire d’activités et de méditations permettant de se mettre en contact avec la vie de notre étincelle divine, de notre cycle respiratoire primaire et permettant ainsi l’arrivée du « repos », de la détente physique et mentale, de la paix intérieure. C’est reconnaître ce cycle en notre corps parcourant la moelle épinière, puis le différencier de notre battement cardiaque et enfin mettre notre cœur en harmonie de ce cycle. Il s’agit donc réellement de faire vibrer « le système parasympathique » de manière à accumuler dans nos ganglions de l’électricité organique ou électrisme (Force nerveuse) et de le mêler à notre cœur, siège de notre magnétisme organique. Les effets sont une augmentation et une montée de la chaleur vertébrale notamment à la dorsale 5, puis dans le crâne, ainsi que des manifestations colorées… Ces processus n’ont qu’un seul but, se charger électromagnétiquement… se recharger en matière première, condenser notre âme, ne plus être que cette matière première, que cette bulle électromagnétique. 

Une fois cette première étape franchie, il convient de travailler en plus de l’âme le corps physique, notre corps saturnien, en un sur-effort quotidien de 3 heures de « prières et holocauste à l’Éternel ». « On prie l’Éternel, on l’adore et on le supplie de dépouiller la partie morale et physique de toute impureté… ». Tel que précisé dans son catéchisme de Compagnon (4). On peut y lire également : « c’est alors qu’avec cette matière première ou ce poignard à la main, il faut que vous assassiniez ce maître, cette pierre brute devenue cubique… ». C’est mettre Mercure en Saturne. On comprend mieux la notion d’holocauste à l’Eternel, il s’agit véritablement de « sacrifier » sa partie physique, de la « putréfier » par la volonté… Mais surtout par le jeûn prolongé tout en maintenant ses activités spirituelles. Nos organes vont ainsi se détoxifier, se « régénérer » les uns après les autres ; par exemple, il faut compter environ 3 à 4 semaines de jeûn pour le foie… et faire éclore « l’âme » de chacun de nos organes. Notre circulation sanguine ne sera dès lors plus accaparée par la digestion et il s’en suivra une intense activité cérébrale, qu’il faut donc occuper et orienter… C’est là l’un des objets des prières… C’est arrêter momentanément le processus de « métallisation » des cellules du corps humain pour les nourrir autrement ; notamment par cette charge électro-magnétique et la pratique respiratoire et vibratoire des prières. Prier est un art triple : c’est d’abord un exercice pulmonaire visant la purification du corps et du sang par de longues expirations prolongées en suivant l’impulsion du coeur… Les premiers chrétiens disaient qu’il fallait prier sans arrêt c’est-à-dire sans arrêt du souffle ; une prière se récite sur une seule et même expiration favorisant ainsi l’expulsion des acides. C’est ensuite, un exercice nerveux par l’emploi du ton vibratoire de la prière produisant ainsi de l’électrisme dans les ganglions et favorisant une intense répartition hormonale vitalisée dans la circulation sanguine. Enfin, prier est aussi un exercice pour l’esprit grâce aux paroles récitées et leur intention permettant une expansion magnétique de nous-même. Cagliostro disait : 

« Que votre âme s’exalte, que votre cœur s’enflamme d’amour pour l’Éternel et redouble de reconnaissance pour notre fondateur en approchant le divin mystère. »

Fusion et révélations

La troisième étape concerne la fusion du corps « mercu-saturnien » avec le corps lunaire ou corps éthérique, notre corps nerveux, par un accroissement de l’activité magnétique, force conservatrice et de notre électrisme nerveux, force d’action…. image de l’œuf. C’est à cette étape que Cagliostro emploie des remèdes sous forme de poudres et de liquides, probablement des essences spagyriques dopant le système nerveux et la force de certains organes notamment des reins de manière à maintenir une chaleur corporelle interne ne brûlant pas… le feu doux… L’œuf ne peut se développer qu’avec une douce chaleur constante. 

La quatrième étape est le Mariage lune soleil… ou l’alliance de ce corps lunaire constitué avec le corps solaire, notre esprit. C’est probablement à ce stade du système que Cagliostro faisait appel aux anges planétaires durant la dernière phase de 7 jours. Alliant ainsi une pratique cyclique ici-bas aux cycles de notre système solaire, microcosme et macrocosme. C’est là que devait arriver la révélation de différents sceaux et communications « divines », la providence divine ne se dévoilant ainsi qu’à ses véritables élus…

Les mots du Grand Cophte 

Pour conclure je laisserai la parole au Grand Cophte qui avait résumé sa praxis en 5 étapes, que vous avez pu approcher en résumé au cours de cet article. Je vous laisse le soin de les méditer afin d’en trouver les analogies avec « nos corps », sel soufre et mercure, vie énergie matière, solide liquide gazeux… : 

1 – À rajeunir et réparer les forces perdues et à augmenter la chaleur et l’humidité radicale ; 

2 – À ramollir et liquéfier la partie solide ; 

3 – À congeler et durcir la partie liquide ; 

4 – À rendre le possible l’impossible et l’impossible possible ; 

5 – À se procurer tous les moyens de faire le bien par toutes précautions utiles de manière réservée et occulte.

(1) Rituel de la Franc-Maçonnerie Égyptienne  – Marc Haven – Préfacé par Daniel Nazir

     Editions Télétès – Page 52

(2) Ibid – Page 21

(3) Ibid – Page 30

(4) Ibid – Page 56

Antares

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